5ème partie : Les 14 photos du Docteur Bernard
Après avoir exploré tous les recoins de la vieille Citroën, Alfred alla chercher un tournevis pour tenter d’ouvrir la boite à gants complètement bloquée par la rouille.
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Après 5 bonnes minutes à forcer pour l’ouvrir, ce qu’il détestait faire en tant que mécanicien, la porte céda dans un crissement strident et Alfred, qui pesait de tout son poids sur le tournevis, se cogna la tête contre le tableau de bord. Il se redressa, étourdit par le choc. Le crissement continua quelques secondes en s’atténuant. Alfred eu l’impression étrange qu’il ne provenait pas de la boite à gants mais de l’ensemble de la carcasse de la vieille voiture… Il se tapota l’oreille en se disant que c’était sûrement un sifflement résiduel causé par le choc.
En s’ouvrant, la boite à gant avait vomi sur le plancher rouillé de la traction deux pochettes en cuir, moisies, derniers secrets de la vieille voiture. Alfred ouvrit la première pochette, elle contenait huit photos sur lesquelles figurait notament une 11 familiale d'avant guerre.
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En contactant Mathilde, la fille cadette du Docteur Bernard, l’ancien propriétaire de la traction, il apprit que ces photos dataient d’avant la guerre, seuls souvenir de Nicole, l’aînée de la famille. Toutes les autres photos avaient été détruites dans l’incendie qui suivi le bombardement de la maison familiale, une nuit tragique de 1943 dans laquelle périt Nicole... Ces huit photos, restées dans la première traction du docteur, témoignage de quelques instants de bonheur insouciant, avaient été épargnées par le feu.
En ouvrant la deuxième pochette, Alfred trouva six autres photos, dans le même état que les huit premières. Souvenirs de l’engagement du Docteur Bernard dans la résistance française, de 1944 à la libération.
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Mathilde lui raconta que son père ne s’en était jamais séparé, ni dans ses tournées de médecin de campagne, ni dans les soirées de la fin de sa vie, noyées dans l’alcool au bistrot du village.
Il les emportait avec lui comme une blessure toujours ouverte et ne les rangeait jamais ailleurs que dans la boîte à gant de ses traction successives. A sa mort, elles y restèrent…
Alfred fit parvenir ces photos à Mathilde.